Le droit à un éventuel gain
Le patrimoine de mon défunt père comprend un appartement de vacances. Je suis d’accord de l’attribuer à ma sœur. En revanche, en cas de revente par ma sœur, je souhaite participer au bénéfice qu’elle réalisera. Que puis-je faire ?
La loi prévoit dans quelques hypothèses un droit légal au gain (par exemple en matière de droit foncier rural), mais ce type de droit ne sera pas traité ici. Le présent article se concentre uniquement sur la notion de « droit conventionnel au gain », dans l’hypothèse où la Loi fédérale sur le droit foncier rural ne s’applique pas. Lors du partage d’une succession et en présence de plusieurs héritiers, il est possible de prévoir que, en cas de revente d’un immeuble attribué à un seul d’entre eux, les cohéritiers de l’attributaire bénéficieront d’un droit à la part au gain réalisé. En pratique, ce droit consiste à partager entre les cohéritiers le bénéfice retiré d’une vente postérieure à l’attribution successorale de l’immeuble.
Si des cohéritiers souhaitent prévoir un droit au gain ensuite de l’attribution d’un immeuble, il suffit d’en informer le notaire qui établira l’acte/la convention de partage. Le notaire introduira ainsi dans le contrat de partage une clause particulière, prévoyant les modalités du droit au gain. Les modalités qui doivent être examinées sont notamment les suivantes :
• La durée maximale pendant laquelle le droit au gain est valable;
• Les cas dans lesquels le droit au gain s’applique: est-ce seulement dans le cadre d’une vente pure ou faut-il intégrer tous les actes économiquement équivalents à une vente (par exemple une donation mixte, une promesse de vente ou un échange ?). A l’inverse, les parties peuvent convenir qu’en cas de transfert de l’immeuble concerné au conjoint ou à un descendant, le droit au gain ne s’applique pas;
• La manière dont est calculé le droit au gain. Le bénéfice soumis au droit au gain correspond à la différence entre la valeur d’attribution de l’immeuble dans la succession et le prix de revente. L’attributaire grevé du droit au gain doit pouvoir déduire certaines impenses de ce bénéfice « brut ». Il s’agit par exemple de l’impôt sur les gains immobiliers à payer lors de la revente ou une éventuelle commission de courtage;
• La part du gain qui doit revenir au cohéritier (est-ce la moitié ou un tiers ou une autre répartition);
• La possibilité de transmettre le droit au gain aux héritiers du bénéficiaire primaire (dans l’hypothèse où le bénéficiaire primaire décède rapidement après la constitution du droit au gain);
• Le délai dans lequel le droit au gain doit être payé aux bénéficiaires après la revente (les parties seront inspirées de prévoir une obligation pour le notaire instrumentant la revente de payer la part au gain en imputation sur le prix de revente).
La dernière question qui se pose est celle de la garantie du droit au gain, puisqu’il n’est pas possible de l’inscrire au Registre foncier. Malgré cela, les parties peuvent, pour s’assurer que le montant dû par l’attributaire-vendeur à ses cohéritiers soit effectivement payé au moment de la revente, demander au notaire (i) d’annoter un droit de préemption au Registre foncier et/ou (ii) d’inscrire un gage immobilier sur l’immeuble concerné par le droit au gain.